À Marguerite
En mon cœur n’est point escrite
La rose ny autre fleur,
C’est toy, blanche Marguerite,
Par qui j’ay cette couleur.
N’es-tu celle dont les yeux
Ont surpris
Par un regard gracieux
Mes esprits ?
Puis que ta sœur de haut pris,
Ta sœur, pucelle d’élite,
N’est cause de ma douleur,
C’est donc par toy, Marguerite,
Que j’ay pris ceste couleur.
Ma couleur palle nasquit,
Quand mon cœur
Pour maistresse te requit ;
Mais rigueur
D’une amoureuse langueur
Soudain paya mon mérite,
Me donnant ceste pâleur
Pour t’aimer trop, Marguerite,
Et ta vermeille couleur.
Quel charme pourroit casser
Mon ennuy
Et ma couleur effacer
Avec luy ?
De l’amour que tant je suy
La jouissance subite
Seule osteroit le malheur
Que me donna Marguerite,
Par qui j’ay cette couleur.