Quand au temple nous serons
Quand au temple nous serons
Agenouillés, nous ferons
Les dévots selon la guise
De ceux qui pour louer Dieu
Humbles se courbent au lieu
Le plus secret de l’église.
Mais quand au lit nous serons
Entrelacés, nous ferons
Les lascifs selon les guises
Des amants qui librement
Pratiquent folâtrement
Dans les draps cent mignardises.
Pourquoi donque, quand je veux
Ou mordre tes beaux cheveux,
Ou baiser ta bouche aimée,
Ou toucher à ton beau sein,
Contrefaistu la nonnain
Dedans un cloître enfermée ?
Pour qui gardestu tes yeux
Et ton sein délicieux,
Ta joue et ta bouche belle ?
En veuxtu baiser Pluton
Làbas, après que Charon
T’aura mise en sa nacelle ?
Après ton dernier trépas,
Grêle, tu n’auras làbas
Qu’une bouchette blêmie ;
Et quand mort, je te verrais
Aux Ombres je n’avouerais
Que jadis tu fus m’amie.
Ton test n’aura plus de peau,
Ni ton visage si beau
N’aura veines ni artères :
Tu n’auras plus que les dents
Telles qu’on les voit dedans
Les têtes des cimeteres.
Donque, tandis que tu vis,
Change, maîtresse, d’avis,
Et ne m’épargne ta bouche :
Incontinent tu mourras,
Lors tu te repentiras
De m’avoir été farouche.
Ah, je meurs ! Ah, baisemoi !
Ah, maîtresse, approchetoi !
Tu fuis comme faon qui tremble.
Au moins souffre que ma main
S’ébatte un peu dans ton sein,
Ou plus bas, si bon te semble.
Les meslanges