François de Malherbe
Né à Caen en 1555. Sa vie est bien connue. Je ne donnerai ici, d’après MM. Fromilhague et Lebègue, que les circonstances de la publication des Œuvres de’ 1630, par quoi s’achève le premier siècle de l’histoire du sonnet français.
« Epuisé par son voyage de La Rochelle, Malherbe mourut le 6 octobre 1628, dans le dénuement. Ses obsèques furent célébrées le lendemain. Le 14 et 16 octobre, les notaires procédèrent à l’inventaire de ses biens. »
Poète architecte, Malherbe veut et cherche du clair, du ferme et du structuré. Il n’empêche — et cela parce qu’il était aussi musicien — qu’une douceur coule dans ses strophes qui évoquent, ici, « l’âme incertaine » de sa dame ou la cruauté qu’elle met à s’éloigner de son amant. N’oublions pas que Malherbe reprit, après Ronsard, le thème de la rose. « Et rose, elle a vécu… »
Poète français né à Caen en 1555, mort à Paris en 1628 François de Malherbe, après des études de droit, quitte la robe pour l’épée et s’attache à la personne d’Henri d’Angoulême, gouverneur de Provence. Il s’installe à Aix où il épouse la fille du président du parlement de Provence, avec laquelle il aura quatre enfants. Il trompe son ennui d’obscur officier en faisant des vers. Henri IV, qui a entendu parler de lui, demande à rencontrer ce soldat poète et le fait venir à Paris. Bien qu’ayant eu des sympathies pour la Ligue, Malherbe, qui a cinquante ans, devient poète de la Cour. Il écrit de nombreuses pièces officielles : odes, stances, sonnets et chansons {Prière pour le roi Henri le Grand allant en Limousin, Sur l’attentat du Pont-Neuf, Ode à Marie de Médicis pour sa bienvenue en France) et va passer une vingtaine d’années à épurer la langue, à combattre l’italianisme et l’envahissement des dialectes, à codifier la versification, et lui donner sa cadence classique. (« Enfin Malherbe vint ! » s’exclamera Boileau)… Une rigueur qui vaudra à Malherbe, sévère jusqu’au ridicule, notamment avec ses précurseurs de la Renaissance, les surnoms de « vieux pédagogue » et de « tyran des mots et des syllabes ». Toutefois, par ses règles rythmiques et son art raisonnable, il prépare l’éloquence impersonnelle du classicisme.
Poète officiel de la régente Catherine de Médias, il meurt en 1628, sortant, paraît-il, de son agonie pour corriger une erreur de langage commise par l’un des veilleurs à son chevet. Il ne s’est pas remis d’un voyage fait à La Rochelle auprès de Louis XIII afin d’obtenir, en vain, le châtiment du meurtrier de son fils : ce dernier, gracié après avoir tué un adversaire lors d’un duel, a été tué à son tour.
Lorsque Boileau, en un vers célèbre, se réjouit de voir qu’« enfin Malherbe vint », il pense naturellement au poète officiel, arrivé sur le tard à la cour en 1605 (il a alors 50 ans) et y développant une conception rigoureuse de la poésie, qui fonde cette esthétique classique dont se réclame, en 1674, l’auteur de L’Art poétique. La postérité longtemps, a ainsi réservé à Malherbe cette place à la fois prestigieuse et impressionnante de chef de file, qui correspond certes à l’influence considérable qu’eut le poète sur tout le xvir9 siècle, mais qui a aussi quelque peu faussé l’image de sa poésie. D’abord en ce qu’elle a fait oublier que la réforme malherbienne s’est inscrite dans une démarche largement subversive, visant à libérer la poésie des conventions où s’était progressivement figé l’héritage ronsardien. Ensuite en ce qu’elle a largement occulté le poète derrière sa doctrine. L’importance accordée par Malherbe au travail du vers, de la rime, des sonorités du rythme, des formes, a sans doute pris le pas chez lui sur l’originalité des thèmes d’inspiration. Mais ce n’est jamais au détriment de la poésie même, et la présence dans son œuvre de certains des plus beaux vers de la littérature française en atteste : d’ailleurs, les poètes ne s’y sont jamais trompés qui, de Valéry ou d’Aragon à Ponge n’ont jamais cessé de le considérer comme une référence, et de voir en lui le fondateur de la poésie moderne. À quoi on pourrait ajouter que l’œuvre de Malherbe n’est pas ce bloc uniforme, sanglé dans des règles strifles, auquel on a trop souvent eu tendance à la réduire.
Le poète provençal Arbaud de Porchères, « cousin de mme de Malherbe » déclara que le défunt lui « avait peu auparavant son décès recommandé et mis entre ses mains toutes les œuvres par lui faites, composées, corrigées et augmentées, tant en prose qu’en poésie, pour les faire imprimer toutes en un volume, sans être mêlées ni accommodées avec aucunes œuvres ». Ce qu’il fit.
Il y a place, y compris dans les grandes odes officielles et dans la poésie d’éloge ou d’apparat, à des inflexions diverses, à des nuances où s’exprime une sensibilité que la poésie amoureuse, plus ouverte à l’expression intime, manifeste bien : les plaintes, les prières, les souffrances n’y cèdent jamais à une effusion facile, mais s’ordonnent de façon mesurée, douce, toujours musicale, comme venant d’un homme qui s’est frotté à la vie, et qui, entre sourire discret et discrète mélancolie, a su faire de son art poétique un art de vivre. D’autant que le Malherbe de la maturité, poète reconnu, maître incontesté, ne s’est pas forgé en un jour. Il y a même un Malherbe d’avant Malherbe, celui de la jeunesse normande puis du séjour provençal, qui n’a pas encore annoté de sa plume sévère les poésies de Desportes, et dont les premiers vers se font dans l’esprit du temps. Cette poésie de la jeunesse, qu’elle évoque la mort d’une jeune fille de manière à la fois brute et recherchée, qu’elle imite Tansillo pour faire couler les larmes de saint Pierre dans une profusion et un entassement d’images pathétiques, ou qu’elle déplore l’inconstance en reconnaissant pourtant sa loi, laisse bien voir que la « manière » de Malherbe s’est d’abord exercée dans des voies où Boileau n’aurait sans doute guère imaginé devoir la trouver.
Issu d’une famille noble, François de Malherbe s’attacha à l’âge de 19 ans à Henri d’Angoulême, fils naturel d’Henri II, et grand prieur de France. Il combattit dans les rangs de la Ligue, avant de se marier avec la fille d’un président au Parlement et de se fixer à Aix-en-Provence. Appelé à Paris pour ses affaires en 1585, il reçut des pensions de Henri IV et de Marie de Médicis. Après la mort de son protecteur un an plus tard, il regagna d’abord la Normandie et puis la Provence. Afin de plaire de nouveau à la cour, Malherbe dédia au roi en vain les 2 poèmes Les Larmes de saint Pierre et Ode de bienvenue à Marie de Médicis.
À la mort d’Henri IV, Marie de Médicis et Louis XIII le protègent. Il devient, plus encore qu’auparavant, le poète de la cour. Il le reste tant que Marie de Médicis dirige les affaires. Quand elle en est écartée, il se tient durant quelques années dans une sorte de retraite. Mais il voit monter la fortune de Richelieu; il s’attache à lui. Richelieu le nomme alors trésorier de France. La fin de sa vie est attristée par la mort de son fils, tué en duel (1627). Les vers de ses dernières années célèbrent la politique du Cardinal. C’est dans ce climat qu’il meurt à Paris en 1628.
La place de Malherbe dans l’histoire de la littérature résulte autant de son activité de poète de cour, ou, comme on disait plus précisément, comme « poète du Louvre » que comme grammairien.
Œuvres en ligne
Œuvres de Malherbe. Éd. revue sur les autographes, les copies les plus authentiques et les plus anciennes impressions et augm. de notices, de variantes, de notes, d’un lexique des mots et locutions remarquables, d’un portrait, d’un fac-similé, recueillies et annotées par Ludovic Lalanne, Tome premier, Tome deuxième, Tome troisième, Tome quatrième, Tome cinquième, Paris, Hachette, 1862
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