En vain, le poème
Aujourd’hui, je m’accuse
d’admettre un bonheur
qui voulut abolir
songes creux et chimères.
Prince de la solitude,
antécédent du silence,
il fallait le rester et ne
jamais choisir le poème
témoin d’un fatal équilibre.
Trop de mots bien placés
nuisent à l’incertitude,
au sommeil monotone
des ruines qui m’aspirent.
Mots espérés pourtant,
attendus, réponse à tout,
mots que l’instant questionne
sans risquer l’existence.
Il faudrait que tout manque
lorsqu’on vient de tout dire,
revenir en arrière dans la volupté noire
d’un alphabet meurtri
qui ne s’ordonne pas.
Aujourd’hui, au déclin de ma
vie trop visible, j’étrangle mon poème :
je veux voir l’intérieur,
les passagers confus
qui me frôlent, se taisent.