Cœur en bouche
Son manteau traînait comme un soleil couchant
et les perles de son collier étaient belles comme des dents.
Une neige de seins qu’entourait la maison
et dans l’âtre un feu de baisers.
Et les diamants de ses bagues étaient plus brillants que des yeux.
« Nocturne visiteuse Dieu croit en moi !
— Je vous salue gracieuse de plénitude
les entrailles de votre fruit sont bénies.
Dehors se courbent les roseaux fines tailles.
Les chats grincent mieux que les girouettes.
Demain à la première heure, respirer des roses aux doigts d’aurore
et la nue éclatante transformera en astre le duvet. »
Dans la nuit ce fut l’injure des rails aux indifférentes locomotives
près des jardins où les roses oubliées
sont des amourettes déracinées.
« Nocturne visiteuse un jour je me coucherai dans un linceul comme dans une mer.
Tes regards sont des rayons d’étoile,
les rubans de ta robe des routes vers l’infini.
Viens dans un ballon léger semblable à un cœur
malgré l’aimant, arc de triomphe quant à la forme.
Les giroflées du parterre deviennent les mains les plus belles d’Haarlem.
Les siècles de notre vie durent à peine des secondes.
À peine les secondes durent-elles quelques amours.
À chaque tournant il y a un angle droit qui ressemble à un vieillard.
Le loup à pas de nuit s’introduit dans ma couche.
Visiteuse ! Visiteuse ! tes boucliers sont des seins !
Dans l’atelier se dressent aussi sournoises que des langues les vipères.
Et les étaux de fer comme les giroflées sont devenus des mains.
Avec les fronts de qui lapiderez-vous les cailloux ?
quel lion te suit plus grondant qu’un orage ?
Voici venir les cauchemars des fantômes. »
Et le couvercle du palais se ferma aussi bruyamment que les portes du cercueil.
On me cloua avec des clous aussi maigres que des morts
dans une mort de silence.
Maintenant vous ne prêterez plus d’attention
aux oiseaux de la chansonnette.
L’éponge dont je me lave n’est qu’un cerveau ruisselant
et des poignards me pénètrent avec l’acuité de vos regards.