Dans bien longtemps
Dans bien longtemps je suis passé par le château des feuilles
Elles jaunissaient lentement dans la mousse
Et loin les coquillages s’accrochaient désespérément aux rochers de la mer
Ton souvenir ou plutôt ta tendre présence était à la même place
Présence transparente et la mienne
Rien changé mais tout avait vieilli en même temps que mes tempes et mes yeux
N’aimez-vous pas ce lieu commun ? laissez-moi laissez-moi
c’est si rare cette ironique satisfaction
Tout avait vieilli sauf ta présence
Dans bien longtemps je suis passé par la marée du jour solitaire
Les flots étaient toujours illusoires
La carcasse du navire naufragé que tu connais —
tu te rappelles cette nuit de tempête et de baisers ? —
était-ce un navire naufragé ou un délicat chapeau de femme
roulé par le vent dans la pluie du printemps était à la même place
Et puis foutaise larirette dansons parmi les prunelliers !
Les apéritifs avaient changé de nom et de couleur
Les arcs-en-ciel qui servent de cadre aux glaces
Dans bien longtemps tu m’as aimé.