Le Cimetière
Ici sera ma tombe, et pas ailleurs, sous ces trois arbres.
J’en cueille les premières feuilles du printemps
Entre un socle de granit et une colonne de marbre.
J’en cueille les premières feuilles du printemps,
Mais d’autres feuilles se nourriront de l’heureuse pourriture
De ce corps qui vivra, s’il le peut, cent mille ans.
Mais d’autres feuilles se nourriront de l’heureuse pourriture,
Mais d’autres feuilles se noirciront
Sous la plume de ceux qui content leurs aventures.
Mais d’autres feuilles se noirciront
D’une encre plus liquide que le sang et l’eau des fontaines :
Testaments non observés, paroles perdues au-delà des monts.
D’une encre plus liquide que le sang et l’eau des fontaines
Puis-je défendre ma mémoire contre l’oubli
Comme une seiche qui s’enfuit à perdre sang, à perdre haleine ?
Puis-je défendre ma mémoire contre l’oubli ?