À Jules de Prémaray
Lecteur, prompt à nous consoler,
Toi qui sais encore voler,
Comme l’abeille, au miel attique,
Ton enthousiaste rumeur
Encourage le doux rimeur,
O voix émue et sympathique !
O mon ami, c’est déjà vieux !
Depuis dix ans, les envieux,
Acharnés sur la même lime,
Ensanglantent leurs yeux ardents,
Et viennent se briser les dents
Contre l’acier pur de ma rime.
O Poésie ! ange fatal !
Des fous marchent d’un pied brutal
A travers tes Édens splendides,
Comme, aux approches de la nuit,
Par les déserts de fleurs s’enfuit
Le troupeau des buffles stupides.
Mais croissez, pervenches et thym !
Comme ces lueurs du matin
Qu’enveloppent en vain des voiles,
O symboles de mes amours !
C’est vous seuls qui vivrez toujours,
Printemps, lauriers, chansons, étoiles !