Ballade à la gloire du Lys
Muse au front d’or, farouche Aganippide,
Je chanterai le Lys, aux Dieux pareil,
Le Lys charmant, le Lys au coeur splendide.
Dès qu’il fleurit, la Nature en éveil,
Comme à son roi, lui demande conseil.
Couche de nacre où s’éveille l’Aurore,
Noble palais que bat la mer sonore,
Blanc coudrier qui sait plaire à Phyllis,
Pommier en fleur qui de rayons se dore,
Rien n’est pareil à la gloire d’un Lys.
La nuit, au bord de la source limpide,
Le Lys s’endort d’un superbe sommeil,
Près du flot bleu qui doucement se ride.
Tel, en songeant, dort sous un dais vermeil
Un roi d’Asie sous son riche appareil.
Neige étendue aux rives du Bosphore,
Clair vêtement qu’un sein aigu colore,
Temple de Tyr ou d’Héliopolis,
Lotus divin dont le flot se décore,
Rien n’est pareil à la gloire d’un Lys.
Tel, ô guerrière, ô blanche Tyndaride,
Le sable est fier de baiser ton orteil,
Le Lys joyeux, riant, de pleurs humide,
Se dresse, orgueil du monde, à son réveil,
Et resplendit dans l’éclair du soleil.
Perle gisant dans l’or du sable more,
Urne que tient la svelte choéphore,
Marbre vivant ciselé par Scyllis,
Nymphe au beau sein compagne du centaure,
Rien n’est pareil à la gloire d’un Lys.
Envoi.
Lys exalté, grande fleur, je t’adore.
Cygne rêvant, contour pur de l’amphore,
Nuit d’argent, voile éthéré des willis,
Col de Vénus, pieds nus de Terpsichore,
Rien n’est pareil à la gloire d’un Lys.
Juin 1861.