Le Berger

Théodore de Banville
par Théodore de Banville
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Tandis qu’autour de nous la Nature se dore

Ivre de fleurs, d’amour et de clartés d’aurore,

Et que tout s’embellit de rayons souriants,

Les chercheurs, les penseurs, les esprits, les voyants,

Les sages, dont la main croit à ce qu’elle touche,

Tiennent dans leur compas l’immensité farouche,

Et disent : Ce berger, que vous appelez Dieu,

N’existe pas. Là-haut, dans les plaines de feu,

Les blancs troupeaux, suivant la trace coutumière,

Sans nul guide, au hasard, marchent dans la lumière

Et, sans que jamais rien ne gêne leur essor,

Rentrent, quand ils sont las, dans leurs cavernes d’or.

Puis dans leur noir réduit, plein d’ombre et de fumée,

Les orgueilleux savants, dont l’oreille est fermée,

Murmurent, en montrant d’en bas les vastes cieux :

Là tout est vide, car tout est silencieux.

Cependant, pour bercer l’infini qui respire,

Le doux Berger pensif touche sa grande lyre ;

Il conduit par ses chants tous les monstres vermeils,

Les Constellations, les Hydres, les Soleils,

Et, sans souci du vil chasseur qui tend des toiles,

Fait marcher devant lui ses grands troupeaux d’Étoiles.
Mars 1864.

Théodore de Banville

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