L’Immortelle

Théodore de Banville
par Théodore de Banville
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Muse, Daudet n’a pas raison;

Sa justice n’est qu’apparente,

Car ta divine floraison

Vit très bien avec les Quarante.
L’Académie est un phénix

Riant comme Cypris dans l’île;

Et certes elle a monsieur X,

Mais elle a Leconte de Lisle.
Elle reçoit dans un salon

Cette duchesse, l’Épopée.

Tu dois aimer l’endroit où l’on

Voit Sully Prudhomme et Coppée.
Dans le vieux palais Mazarin

Où ta chanson la divinise,

Minerve au lourd casque d’airain

Avec toi joue et s’humanise.
Il vaut mieux, et c’est plus décent,

La voir là que dans une auberge,

Et ton bel oeil incandescent

Fait rire à propos cette vierge.
La palme verte a moins d’appas

Et moins de splendeur qu’une rose,

Mais cependant on n’en meurt pas.

Va pour un peu d’apothéose!
Tes yeux sont pleins de diamants

Et de sagesse et de folie,

Et tous les travestissements

Te rendent encor plus jolie.
Les charmes sont divers, mais on

En voit chez toi le monopole,

Et quand tu vas dans la maison

Où l’on est sous une coupole,
Chacun regarde tes cheveux

Et songe et te voudrait pour sienne,

Et tu peux même, si tu veux,

Te faire académicienne.
21 juillet 1888.

Théodore de Banville

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