La Figliola

Victor Hugo
par Victor Hugo
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Moins de vingt ans et plus de seize,
Voilà son âge ; et maintenant
Dites tout bas son nom : Thérèse,
Et songez au ciel rayonnant.

Quel destin traverseratelle ?
Quelle ivresse ? quelle douleur ?
Elle n’en sait rien ; cette belle
Rit, et se coiffe d’une fleur.

Ses bras sont blancs ; elle est châtaine ;
Elle a de petits pieds joyeux,
Et la clarté d’une fontaine
Dans son regard mystérieux.

C’est le commencement d’une âme,
Un rien où tout saura tenir,
Coeur en projet, plan d’une femme,
Scénario d’un avenir.

Elle ignore ; elle est gaie et franche ;
Le dieu Hasard fut son parrain.
Elle s’évade le dimanche
Au bras d’un garnement serein.

Il est charmant, elle est bien faite,
Et Pantin voit, sans gardefou,
Flâner cette Vénus grisette
Avec cet Apollon voyou.

Elle s’ébat comme les cygnes ;
Et sa chevelure et sa voix
Et son sourire seraient dignes
De la fauve grandeur des bois.

Regardezla quand elle passe ;
On dirait qu’elle aime Amadis
A la voir jeter dans l’espace
Ses yeux célestes et hardis.

Ces blanches filles des mansardes
Aux tartans grossiers, aux traits fins,
Ont la liberté des poissardes
Et la grâce des séraphins.

Elles chantent des chants étranges
Mêlés de misère et de jour,
Et leur indigence a pour franges
Toutes les pourpres de l’amour.

Toute la lyre

Victor Hugo

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