L’église (IV)
IV.
Un grand houx, de forme incivile,
Du haut de sa fauve beauté,
Regardait mon habit de ville ;
Il était fleuri, moi crotté ;
J’étais crotté jusqu’à l’échine.
Le houx ressemblait au chardon
Que fait brouter l’ânier de Chine
À son âne de céladon.
Un bon crapaud faisait la lippe
Près d’un champignon malfaisant.
La chaire était une tulipe
Qu’illuminait un ver luisant.
Au seuil priait cette grisette
À l’air doucement fanfaron,
Qu’à Paris on nomme Lisette,
Qu’aux champs on nomme Liseron.
Un grimpereau, cherchant à boire,
Vit un arum, parmi le thym,
Qui dans sa feuille, blanc ciboire,
Cachait la perle du matin ;
Son bec, dans cette vasque ronde,
Prit la goutte d’eau qui brilla ;
La plus belle feuille du monde
Ne peut donner que ce qu’elle a.
Les chenilles peuplaient les ombres ;
L’enfant de choeur Coquelicot
Regardait ces fileuses sombres
Faire dans un coin leur tricot.
Les joncs, que coudoyait sans morgue
La violette, humble prélat,
Attendaient, pour jouer de l’orgue,
Qu’un bouc ou qu’un moine bêlât.
Au fond s’ouvrait une chapelle
Qu’on évitait avec horreur ;
C’est là qu’habite avec sa pelle
Le noir scarabée enterreur.
Mon pas troubla l’église fée ;
Je m’aperçus qu’on m’écoutait.
L’églantine dit : C’est Orphée.
La ronce dit : C’est Colletet.
Un commentaire
Quel honte,tronqué ainsi cette poésie merveilleuse de Victor Hugo est un crime!Ce chef-d’oeuvre poétique est à lire dans son intégralité!!