Au Démon secret
Le peuple, sans perplexité, vénère. Il encense, invoque ou répudie. Il donne trois, ou six ou neuf prosternements. Il mesure son respect à la compétence, aux attributs, aux grâces qu’il escompte juste.
Car il sait précisément les goûts du génie de l’âtre ; les dix-huit noms du singe qui donne la pluie ; la cuisson de l’or comestible et du bonheur.
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De quelles cérémonies l’honorer ce démon que je loge en moi, qui m’entoure et me pénètre ? De quelles cérémonies bienfaisantes ou maléfiques ?
Vais-je agiter mes manches en respect ou brûler des odeurs infectes pour qu’il fuie ?
De quels mots d’injures ou glorieux le traiter dans ma vénération quotidienne : est-il le Conseiller, le Devin, le Persécuteur, le Mauvais ?
Ou bien Père et grand Ami fidèle ?
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J’ai tenté tout cela et il demeure, le même en sa diversité,
Puisqu’il le faut, ô Sans-figure, ne t’en va point de moi que tu habites :
Puisque je n’ai pu te chasser ni te haïr, reçois mes honneurs secrets.